Deux piliers du Mâconnais honorés
L’émotion était palpable vendredi 18 octobre. Plus que de simples plaques, ce sont de véritables hommages, sincères et mérités qui sont venus saluer deux carrières extraordinaires. Pas que, celle de deux hommes faisant l’unanimité : Bernard Delaye et Alain Faure. La salle de dégustation et le chai porteront respectivement leur nom. Les murs et vins de l’exploitation du lycée de Davayé sont désormais sous bonne garde et haut patronage.

La cérémonie a été à la hauteur de ces deux hommes : simple, conviviale et en même temps, pleine de professionnalisme et d’élégance. Un bel hommage en l’honneur d’Alain Faure et de Bernard Delaye, tous deux de grands serviteurs de la profession viticole et agricole. Tous deux ont œuvré à développer le lycée agricole et viticole de Davayé. Il était donc naturel de les voir réunis sur les murs de l’exploitation du lycée et trôner, en saints protecteurs, des futures générations de vignerons. Car, c’est finalement à cela qu’ils ont consacré leur vie et leurs carrières. Ainsi, témoignaient leurs familles respectives, leurs amis, leurs collègues, leurs « élèves » désormais vignerons et même l’État français en la personne du Préfet de Saône-et-Loire et de nombreux élus professionnels, venant saluer leurs mémoires.
Le directeur d’ABC Davayé, Jean-Philippe Lachaize retraçait tout d’abord l’histoire de ce lieu. Un chai remontant au XVIIe siècle, « où il faisait chaud l’été et froid l’hiver ». Un lieu pas forcément propice donc à élever la qualité des vins issus des vignes alentour. D’autant qu’à la première rentrée scolaire de 1966, l’établissement est aussi largement tourné vers l’agriculture et l’élevage caprin, qui reste encore aujourd’hui avec la ferme caprine des Poncétys en contrebas. Une belle rénovation a été entreprise depuis, rendant aujourd’hui ce chai « performant », et ce, justement grâce au travail sans relâche.
En 1980, à la sortie de son concours administratif, Alain Faure est accueilli dans sa nouvelle région d’adoption – « au pied de la Roche » par un tout jeune vigneron, Robert Martin. Regardant Annie, sa femme, et Auriane, sa fille, il se souvient comme si c’était hier de sa « première vendange et de son baptême »… du feu. Alain Faure était cependant à son bureau le lundi à 6 heures comme d’habitude, preuve de sa force de caractère et de son implication au travail. « Alain avait sa propre définition de la famille. Il était né dans une famille de paysan maraîcher et il a gardé des liens d’amitié indéfectibles », se souviennent Auriane et Simon, ses enfants, « d’un papa qui sentait la bonne odeur de la vigne ». Alain Faure voulait faire de l’exploitation du lycée un support pédagogique et ne perdra jamais non plus de vue « le sens du service public et du travail acharné en lien avec une solide profession », lorsqu’il acceptera sa promotion en tant que chef d’unité à la DDA (désormais DDT) en 1998. Un « déchirement » alors qu’il sillonnait les salons pour développer les ventes bouteilles du domaine des week-ends durant. « Sa passion et sa grande victoire ». Aujourd’hui, le cuvage « qu’il adorait » gardera à jamais sa trace avec l’ancienne vis du pressoir qui renforce la charpente, comme un symbole de durabilité.
Deux légendes gravées
Les honneurs étaient tout aussi appuyés pour Bernard Delaye, « serviteur » de l’État, de l’Enseignement agricole et des vins de Bourgogne. Et plus largement tant son engagement « bacchique » l’a amené à briser les frontières. « Un mythe vivant connaissant tous les vignerons de France ». Il arrive comme surveillant en 1975 à Davayé, avant de terminer comme CPE jusqu’en 2006. Avec déjà « sa voix de stentor, toujours dans un costume élégant, l’autorité chevillée au corps ». Il savait être strict mais toujours juste et surtout, Bernard Delaye était là pour aider des générations d’élèves à réussir dans la vie, dans leurs carrières, dans leurs rêves de devenir vignerons.
Mais cela ne pouvait suffire à Bernard Delaye qui « hérite » du concours viticole de la Société d’Agriculture du Mâconnais Beaujolais, qu’il va déménager de Davayé à Mâcon, face au succès grandissant. À sa retraite, Bernard Delaye va continuer de s’investir pour les produits agricoles et viticoles, locaux et même au-delà. Il prend la présidence du Concours des Grands vins de France et en fait le 2e plus grand concours des vins, de justesse après Paris, excusez du peu. Au Comité des salons et foires, il lancera le Marché des plaisirs gourmands qui à ce jour reste une grande fête gastronomique inégalée. Son « univers » était la jouissance des sens « olfactif et gustatif », lui qui a formé des promotions entières à la dégustation des vins. Son nom figurera désormais au-dessus de chaque amateur de vin passant la porte de la salle de dégustation à Davayé.
Leurs deux noms sont désormais « gravés dans ce bel écrin » comme pour faire de ces lieux, leur deuxième maison. Et pour conclure, rien de mieux que deux citations qu’ils auraient sans doute aimé partager : « Le vin est ce qu’il y a de plus civilisé au monde » ; « Comme le vin, les légendes réjouissent le cœur de l’homme ». Chaque invité les ayant connus pouvait voir et boire dans ces mots, beaucoup d’Alain Faure et de Bernard Delaye.