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Vinipôle Sud Bourgogne à Davayé

Avec Flav’tech, la lutte contre la flavescence va changer de dimension

La chambre d’agriculture de Saône-et-Loire et ses partenaires ont officiellement lancé le projet Flav’tech en présence du préfet, Yves Séguy. La technologie et l’IA sont appelées à la rescousse pour faire face à la propagation de la flavescence dorée.

Par David Bessenay
De g. à d., Patrick Desroches, Céline Poulin, Marc Sangoy, Yves Séguy, Bernard Lacour et Jérôme Chevalier.
Les partenaires en sont convaincus, la détection précise et la fluidification de l’information permettront une meilleure lutte contre la propagation du fléau. De g. à d., Patrick Desroches, Céline Poulin, Marc Sangoy, Yves Séguy, Bernard Lacour et Jérôme Chevalier.

À défaut d’un remède miracle contre la flavescence dorée (la recherche d’un vaccin se poursuit…), la viticulture saône-et-loirienne avec le soutien de l’État et du Département s’engage sur un projet de quatre ans visant à accélérer et massifier le processus de détection. Une avancée importante à l’heure où cette détection repose exclusivement sur les épaules, et les yeux, des vignerons.

Pour Marc Sangoy, président de la commission viticole à la chambre d’agriculture : « la maladie est contenue, mais on ne peut pas dire que la situation s’améliore. Et puis c’est un véritable traumatisme de devoir arracher des hectares de vignes. On veut montrer aux vignerons qu’ils ne sont pas seuls face au problème ». Un point sur lequel Céline Poulin, présidente du Vinipôle insiste : « on se sent dépourvu, c’est très important pour le mental de se sentir soutenu ».

Les suites du hackathon de VinEquip

Le projet a commencé lors du salon VinEquip en mars dernier, « l’organisateur, GL Events, nous a demandé de trouver un thème mobilisateur, j’ai pensé à la flavescence car il y avait un certain essoufflement. On avait besoin d’introduire les technologies pour pallier les limites humaines », se souvient Jérôme Chevalier, vice-président de la CAVB (Confédération des appellations et vignerons de Bourgogne), « on a alors lancé ce hackathon ». Ce défi consistait à « enfermer » et faire cogiter quatre start-up sur le sujet pour qu’elles fassent émerger des idées novatrices. Ce challenge a été remporté par la société Algaric-IG entreprise d’infogérance spécialisée dans les systèmes d’information géographique (SIG).

Dans la pratique, c’est donc le Vinipôle grâce à Benjamin Alban et Hugo Adellon qui supervisera ce projet qui débutera officiellement en janvier prochain (et jusqu’en décembre 2028) avec un budget global de 380.000 euros, financement assuré par la Préfecture dans le cadre du plan d’investissement FNADT (Fonds national d’aménagement et de développement du territoire) et grâce à l’intervention du Député Benjamin Dirx. « Je me suis fortement mobilisé sur cette thématique, c’était un engagement de campagne, mais ce plan est avant tout une réussite collective », témoigne ce dernier.

Deux à trois rencontres annuelles seront programmées entre les différents partenaires pour faire un point sur l’état d’avancement. Outre ceux déjà cités, on retrouve la Draaf, la Fredon Bourgogne-Franche-Comté, la CAVB ou encore Agro Dijon.

Détecter plus vite, avec plus de précision, sur des plus grandes surfaces

À ce jour, la prospection humaine est organisée par la Fredon BFC, avec le relais d’un responsable dans chaque commune pour organiser les tournées. Mais ce système à ses limites : il est très chronophage, il oblige à engager de nombreux acteurs, les risques de perte d’informations (remontée d’infos papier) ne sont pas négligeables, le suivi des arrachages est compliqué (sur la bonne foi des vignerons) et la traçabilité n’est pas optimum.

Comme le rappelait la directrice de la Fredon BFC, Marie-Charlotte Paput, « pour l’instant, la détection, c’est une carte imprimée, un stylo Bic et de la rubalise ». Ce qui fait dire au préfet que la prospection devait « changer d’époque et de dimension ».

L’objectif sera donc d’aller au-delà de l’œil organique, de remplacer l’observateur piéton par une caméra pour avoir un suivi automatisé. Concrètement, il est possible d’envisager des caméras embarquées sur les machines à vendanger, sur des drones, voire des ULM. « Il n’y a pas de verrou technologique », assurent Jean-Noël Paoli et Gawain Jones, enseignants-chercheurs Agro Dijon, spécialistes de l’imagerie (labo IMVIA).

Ensuite, la société Algaric-IG interviendra pour « améliorer la chaîne de collecte et de traitements de l’information entre chambre d’agriculture, coopératives, Fredon, etc. » en rassemblant tous les flux pour aboutir à une cartographie extrêmement précise.

Reste une interrogation, l’IA sera-t-elle capable, là où l’œil humain échoue, de faire la différence entre les symptômes de la flavescence dorée et une jaunisse ? Rien n’est moins sûr pour l’instant et l’analyse en labo devrait rester indispensable.

Projet d’intérêt public

Les partenaires « ne cherchent pas une solution révolutionnaire, juste quelque chose d’applicable rapidement. Il n’y a plus de temps à perdre ».

Et de rappeler que le sujet ne concernait pas que la viticulture, car la flavescence dorée est une maladie dite de « quarantaine », qui entraîne des décisions préfectorales (obligation d’arrachage, passage d’insecticides), elle touche donc à la fois l’administration, mais aussi tous les riverains des vignes traitées.

Bien que lancé en Saône-et-Loire, Flav’tech intéresse l’ensemble du vignoble bourguignon et même au-delà, « c’est un projet d’intérêt général, résume le préfet, Yves Séguy. L’arrachage, c’est un crève-cœur surtout sur un territoire comme le nôtre où la vigne est un totem. La tâche est immense : dépister, repérer, arracher avec parcimonie. En alliant connaissance, compétences, technologies, on peut y arriver. C’est un projet porteur d’espoir, il vise à tordre le cou à la fatalité ».