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Association Charolais Evaluation 71

Association Charolais Evaluation 71 : le collectif à l’épreuve du temps

Depuis 1996, l’association Charolais Evaluation 71 permet à des éleveurs d’accéder à de la génétique d’élite. Trois trophées des champions et une production remarquable dans de nombreux élevages prouvent que ce collectif a toute sa raison d’être. Même si l’époque n’y aide par vraiment.

Par Marc Labille
Association Charolais Evaluation 71 : le collectif à l’épreuve du temps
Assemblée générale de Charolais Evaluation à Charolles. Au premier plan de gauche à droite : Anne Deblangey, compagne de l’ancien président Denis Brochot ; Alexandre Barge, trésorier ; Didier Métrop, président et Agnès Avril, assistante de l’association.

L’association Charolais Évaluation 71 (CE 71) a procédé à son assemblée générale annuelle le 22 octobre dernier à Charolles. Se tenant habituellement en juillet et donnant lieu à une visite d’exploitation estivale, le rendez-vous avait été retardé de quelques mois cette année, contraint par les conditions de récoltes singulières de 2024. En pleine agitation automnale, une douzaine d’éleveurs sont venus assister à cette assemblée générale un peu particulière. Parmi eux, un Gaec venu du Cantal et deux exploitants de la Loire.

Les débuts d’Un Artiste…

En 2023, l’association Charolais Évaluation comptabilisait 35 adhérents. L’objectif de ce collectif est chaque année d’acquérir, à plusieurs, un ou deux taureaux charolais d’élite qu’un éleveur seul ne pourrait s’acheter. Le taureau acquis en 2023 est Un Artiste, né dans l’élevage Clame-Aubouard dans l’Allier. Dans cet élevage au cheptel réputé, les membres de l’association sont allés choisir « un veau très racé, doté d’un sang peu diffusé, issu d’une mère exceptionnelle », décrivait Didier Métrop, président de Charolais Évaluation 71 (CE 71). Entré au centre de production de semences de Fontaines le 5 décembre, Un Artiste a fourni ses premières doses dans la foulée. À l’issue de ce séjour, il est allé se refaire une santé sur l’exploitation d’Alain Gonnot à la Tagnière. Puis l’animal a été revendu comme il se doit à l’un des adhérents de l’association. C’est le Gaec Lally de Saint-Léger-du-Bois qui a acquis ce taureau. 251 doses de semences d’Un Artiste ont été distribuées aux adhérents de CE 71 pour sa première année d’utilisation.

De belles ventes de taureaux et de doses

Un Artiste s’avère un achat « raisonnable » puisqu’il a coûté 7.000 € au collectif composé de 35 élevages. Dans le même temps, l’association a réalisé de belles ventes, à commencer par celle d’Un Artiste lui-même ainsi que de Sublime, taureau qui venait de briller au concours d’Autun 2023. À ces deux cessions, pour un montant total de 11.980 € s’ajoute la vente de doses dont la recette atteint 16.314 €. Ces semences ont trouvé preneurs auprès de cinq élevages et surtout à l’export grâce à la société Simon Génétic. D’autres ventes export sont à attendre pour 2024 avec le même opérateur. Didier Métrop signalait aussi la demande d’Elva Novia et de Gènes Diffusion qui seraient preneurs de doses de Ouistiti en quête de taureau d’ouverture pour leur schéma de sélection.

Ce bilan commercial permet à l’association de présenter un résultat largement positif à plus de 10.000 €. « Cela fait longtemps qu’on n’avait pas eu un tel résultat », se félicitait Didier Métrop.

Saône-et-loiriens désormais en minorité…

Mais en dépit de ce bon bilan, l’association Charolais Évaluation fait face à un certain nombre de questionnements. Elle compte désormais plus d’adhérents dans les autres départements qu’en Saône-et-Loire. Le collectif s’éparpille ainsi du nord de la France jusqu’au sud de l’Auvergne dont seulement 16 élevages du 71. Ce rayonnement national n’est pas sans soulever quelques difficultés de logistique dans l’acheminement des doses, soulignait-on. Il traduit aussi une certaine démobilisation des éleveurs du berceau pour l’association. En témoigne le fait que seulement 19 élevages ont adhéré d’emblée pour le dernier achat en date. Une déception pour les responsables de CE 71 alors qu’ils renouaient avec un veau grand raceur digne de Réglisse, ce taureau issu de l’élevage Lacour (Saint-Vincent-des-Prés) qui a remporté le trophée des champions 2023.

Retrouver un accompagnement technique

Avec trois trophées des champions remportés grâce aux excellentes productions des taureaux Turbo, Bobino et Réglisse, l’association ne manque pourtant pas d’arguments. Les 19 derniers taureaux détenus par l’association ont donné 8.900 produits dans 268 élevages et généré de nombreuses récompenses sur les concours, sans parler des progrès génétiques accomplis par les utilisateurs. L’association fait la promotion de son action sous diverse forme, mais l’animation technique dont elle bénéficiait autrefois n’est plus là. L’engouement et la disponibilité des éleveurs ne sont plus les mêmes et six administrateurs vont être à renouveler d’ici peu (lire encadré). Parce que tout repose désormais sur une poignée d’éleveurs bénévoles et que les choses se sont beaucoup complexifiées ces dernières années, un accompagnement à la fois technique et administratif supplémentaire serait le bienvenu, estime Didier Métrop. Un service qu’il faudra parvenir à financer. En sachant que l’achat de taureaux dans un tel cadre implique nécessairement des frais supplémentaires de mise aux normes. Une obligation dont le coût oscille entre 4.400 et 7.000 € par taureau.

Hommage à Denis Brochot

Réunis à Charolles, les responsables de Charolais Évaluation 71 ont rendu hommage à Denis Brochot, emporté par la maladie en décembre 2023 à l’âge de 61 ans. Éleveur-sélectionneur de charolais à Curgy, Denis Brochot a longuement présidé l’association jusqu’en 2016, rappelait Didier Métrop son successeur. Éleveur réputé de l’Autunois, président de l’Ajec en son temps, administrateur au Herd-Book, Denis Brochot était une figure de la sélection charolaise, une personnalité qui a marqué la race, le département et de nombreux jeunes qui ont beaucoup appris à son contact lors de leurs stages sur la ferme de Curgy. Denis Brochot aura marqué de son empreinte l’association Charolais Évaluation 71. Le taureau qui résume le mieux cette époque est Bobino. L’animal avait alors été acheté plus de 35.000 € à l’élevage Melaye-Sennepin (58) lors de la vente du Gercela (58). Ce taureau, dont l’achat doit beaucoup à Denis Brochot, a laissé une remarquable production, dont de nombreux prix d’honneur et de belles vaches, tout en élevant le niveau génétique de nombreux cheptels.

L’expression d’un ras-le-bol

Particulière à plus d’un titre, cette assemblée générale a aussi été marquée par l’annonce par Didier Métrop de sa démission de la présidence de l’association. Une décision lourde de sens tant elle reflétait une lassitude générale devant le désengagement ambiant, la baisse du nombre d’éleveurs, la surenchère de contraintes administratives et sanitaires… Évoquant « le contexte économique et climatique particulier et des éleveurs débordés par le travail », Didier Métrop a regretté que l’association n’ait plus l’accompagnement dont elle bénéficiait à sa création en 1996. Il se désolait aussi d’une raréfaction des élus du berceau de race au sein du HBC comme il déplorait une forme de cacophonie régnant dans le sanitaire au moment où FCO et MHE sévissent… Dans un tel contexte, « cela devient de plus en plus difficile d’être responsable d’association ou organisateur d’évènement », résumait-il visiblement éprouvé par ces dernières semaines.

Volcan prêt à faire feu !

Volcan prêt à faire feu !

Le dernier achat en date de l’association Charolais Évaluation est Volcan. Ce veau a été dégoté en septembre dernier à la vente aux enchères de Moulins (03). Le collectif a déboursé 16.600 € pour ce potentiel grand raceur né au Gaec Boileau dans le Puy-de-Dôme. La tâche n’était pas facile cette année, tant il devient difficile de trouver un nouveau sang tout en recherchant les gènes d’intérêt, expliquait Didier Métrop. À Moulins, douze adhérents de l’association sont tombés d’accord pour miser sur un très bel animal, fils de Mirador (Cordebois) prix d’honneur à Boussac – « un taureau qui produit bien » et de Rosace, « une vache longue et fine dotée d’un index ISU de 116 ». Non porteur de l’ataxie, porteur hétérozygote du « bon » gène culard « mh beef », Volcan est en pleine forme et se prépare à participer au concours de Saint-Gervais-d’Auvergne.