Parce que le pâturage reste le mode d’alimentation qui offre le meilleur rapport qualité/prix, il est important de bien réussir sa mise à l’herbe grâce à une bonne préparation.
Les climatologues prédisent à la Saône-et-Loire le climat de la Drôme dans les prochaines années. Il est donc l’heure de regarder ce qui se fait à 200 km plus au Sud de notre département. « L’organisation des pâtures avant la mise à l’herbe passe d’abord par un bilan de l’année passée », préconise Jean-Pierre Manteaux, conseiller élevage et bovins lait à la chambre d’agriculture de la Drôme. « L’agriculteur a tout à gagner à étudier les résultats de la saison passée, d’où l’intérêt d’enregistrer ses pratiques pour chaque parcelle. Cette tâche sera désormais facilitée grâce à l’application HappyGrass* ».
Pour Jean-Pierre Manteaux, l’agriculteur doit faire le point : a-t-il été débordé par l’herbe au printemps ? Ou a-t-il dû faire sur-pâturer en étant en manque d’herbe toute l’année ? En intégrant les spécificités du sol (humide ou séchant), le climat et les types de prairies, il saura déjà ce qu’il doit prévoir : augmenter la surface offerte ou bien la réduire. Et ainsi organiser son parcellaire en toute connaissance de cause.
Gestion du parcellaire
La tendance actuelle est au morcellement en petits paddocks sur lesquels on augmente le nombre d’animaux, mais sur un délai assez court pour ne pas pénaliser la repousse. Cette pratique mérite d’être étudiée au cas par cas. Ce système de pâturage tournant demande d’adapter les clôtures. Cela sous-entend également d’aménager des accès et de disposer de chemins bien entretenus ne présentant pas de risques pour les pieds des animaux. Il faut également penser les systèmes d’abreuvement pour chaque paddock ou alors rendre des points d’eau accessibles par des chemins suffisamment larges pour le croisement des animaux. « Avec le changement climatique et les sècheresses, nombre d’éleveurs sont confrontés à la disparition de sources. Ce qui les oblige à faire de lourds investissements », indique le conseiller. La Région Bourgogne Franche-Comté et le Département de Saône-et-Loire apportent des aides à l’achat d’équipements pour récupérer les eaux pluviales de toitures par exemple.
Maîtrise de la pousse
Concernant la préparation des sols, les spécialistes remettent en question le hersage des prairies, car son intérêt agronomique n’a pas été réellement prouvé. Cette intervention doit être réservée à des cas particuliers. En fonction du planning de rotation des pâtures, il peut être important de booster celles qui accueilleront les animaux en premier. L’épandage de lisier et de fumier ou l’apport d’un engrais azoté (40 unités/ha) doivent être raisonnés en rapport avec le chargement. « Là encore, il s’agit pour l’éleveur de se référer à la saison passée. Selon son constat : trop ou pas assez d’herbe, il jouera sur ce levier pour maîtriser la pousse ».
Magdeleine Barralon
* Issus de la fusion de l’application GrassMan et de PaturNET, le site internet et l’application pour smartphone HappyGrass sont destinés aux éleveurs et aux conseillers techniques pour conduire les prairies et gérer le pâturage. À noter que pour 2021, le Cniel (interprofession laitière) propose une formule « découverte », gratuite pendant un an. Il offre également un mois gratuit sur le prix de la licence « expert ». Pour plus d’informations, contactez votre conseiller.e de secteur ou happygrass.fr
TÉMOIGNAGE : Le Gaec des Tillets utilise le pâturage tournant dynamique depuis quatre ans
Le Gaec des Tillets est un élevage laitier familial. Il comprend quatre associés : Catherine et Daniel Janéas, les parents, et les fils, Jérôme et Nicolas. Il livre son lait à la fromagerie de la vallée de l’Ain pour la fabrication de Comté. Le cheptel comprend 100 vaches laitières pour le lait, 10 vaches pour les veaux de lait et 25 génisses de renouvellement. La SAU de 250 ha est composée de 180 ha de prairies temporaires en majorité et 70 ha de céréales pour l’autoconsommation. « La mise à l’herbe demande pas mal de réflexion pour mettre en place le principe du pâturage tournant dynamique, ensuite c’est un roulement qui se met en place », explique Jérôme Janéas. « En premier lieu, nous estimons le nombre de vaches qui vont au pâturage. Ensuite, avec Camille Satre, notre conseillère du contrôle laitier, nous évaluons les surfaces nécessaires pour fournir la quantité de matière sèche correspondant à un repas par vache et par jour. Les prairies sont fertilisées avec notre lisier. Au bout de trois semaines, si le temps est beau et les sols portants, on entame le roulement. Au printemps, les laitières reviennent tous les 17 jours. Cette méthode évite le tassement des sols et permet un meilleur redémarrage des prairies. »
Mieux valoriser les pâtures
Appliqué depuis quatre ans, ce système a permis au Gaec de mieux valoriser les pâtures. « Nous n’avons plus de refus, on ne broie plus, on fait des économies sur les charges », indique Jérôme Janéas. « Surtout, toute l’herbe est optimisée. Au printemps, quand l’herbe pousse vite en quantité, on réserve quelques parcs que l’on fauche le plus tôt possible, ce qui nous fait une réserve de foin. En 2018, on a fait 145 rouleaux supplémentaires. Les génisses sont gérées de la même manière, simplement le changement s’effectue au bout d’une semaine, elles réintègrent le paddock de départ au bout de 21 jours », poursuit-il. Et également de conclure : « cette méthode est efficace dans la prévention du parasitisme ».