Influenza
Influenza : le Covars recommande de surveiller les élevages bovins

Face à la contamination – inédite – des vaches par l’influenza aviaire aux États-Unis, le Covars (Comité de veille et d’anticipation des risques sanitaires) propose de surveiller les élevages bovins français situés près d’un foyer de volailles.

Influenza : le Covars recommande de surveiller les élevages bovins

Dans un document publié le 24 mai, le Comité de veille et d’anticipation des risques sanitaires (Covars) propose d’« anticiper la mise en place d’une surveillance active des élevages bovins et caprins à proximité des élevages d’oiseaux contaminés » par l’influenza aviaire. Le rapport de cette instance, placée auprès du gouvernement, porte sur l’épizootie en cours aux États-Unis, marquée pour la première fois par des contaminations de vaches laitières, ainsi que trois cas humains. Plus largement, le Comité veut aussi « renforcer » la surveillance de l’influenza aviaire « en France hexagonale et dans les départements d’outre-mer », que ce soit dans l’environnement, chez les animaux ou encore « chez l’homme, au contact d’animaux potentiellement contaminés ».

La « surveillance active » (prélèvements de routine) prônée par le Covars consisterait en un « suivi sérologique » des animaux, complété si possible par une « surveillance des lisiers/fumiers des élevages en plein air ». Car, rappelle le Comité, « l’hypothèse la plus probable » expliquant les contaminations aux États-Unis est celle d’une « consommation par les vaches laitières de litière souillée par des déjections d’oiseaux infectés ». Les experts recommandent d’ailleurs de « soutenir la recherche » sur ce mode de transmission.

La souche américaine absente en Europe

Par ailleurs, le Covars préconise aussi « une vigilance particulière » sur « la consommation de produits laitiers, en particulier de fromages crus », étant donné que, chez les bovins infectés, « le virus est excrété dans le lait à des niveaux élevés ». « Un suivi des études en cours sur le risque de contamination humaine lié à la consommation de produits dérivés du lait ou de viande bovine actuellement conduites par les autorités des USA devra être réalisé par l’Anses », lit-on dans le rapport. L’épizootie en cours outre-Atlantique a permis de découvrir le « fort tropisme [du virus influenza] pour les glandes mammaires des vaches laitières » (en raison des récepteurs présents sur certaines de leurs cellules).

Après avoir connu dix foyers durant l’hiver 2023-2024, la France est aujourd’hui indemne d’influenza aviaire, notamment grâce à la vaccination des canards. L’avis du Covars souligne que la souche virale qui a contaminé les bovins aux États-Unis n’est actuellement pas présente en Europe. Mais elle pourrait rejoindre le Vieux continent via les oiseaux migrateurs, qui pourraient être infectés dans leurs « zones de nidification humides arctiques ». Autre voie possible : « La migration passant par le Mexique ou survolant le golfe du Mexique », qui pourrait contaminer des oiseaux dans les Caraïbes (Martinique et Guadeloupe, en ce qui concerne la France).

Aux USA, 82 foyers bovins et trois cas humains

Le 30 mai, les autorités sanitaires américaines ont annoncé qu’une troisième personne avait été infectée par la grippe aviaire, dans le Michigan, en lien avec l’épizootie d’influenza aviaire, tout en soulignant que le risque pour la population américaine restait toutefois « faible ». Comme pour les deux premiers cas, cette personne travaille dans une ferme et était, dans ce cadre, exposée à des vaches infectées, ont déclaré les Centres de prévention et de lutte contre les maladies (CDC). Mais, alors que les deux premiers patients avaient seulement présenté des symptômes bénins aux yeux (conjonctivite), cette troisième personne a en plus rapporté des symptômes « plus typiques » d’une maladie respiratoire, dont de la toux (sans fièvre).

Le troisième patient américain a été soigné avec un médicament antiviral (oséltamivir), s’est isolé chez lui, et « ses symptômes sont en voie d’amélioration », ont ajouté les CDC, précisant que ses proches ne présentaient pas de symptômes. Compte tenu de la propagation du virus (82 foyers dans neuf États, selon l’USDA, le ministère américain de l’Agriculture), la découverte de ce nouveau cas n’est « pas surprenante », tout comme le serait celle de cas supplémentaires à l’avenir, selon les CDC.

« L’évolution des virus H5 est imprévisible »

Les études internationales convergent pour affirmer que « le niveau de risque pandémique n’a pas augmenté pour l’homme », souligne le rapport du Covars, car les virus influenza n’ont toujours pas acquis la capacité de se transmettre d’une personne à une autre. Pour autant, la prudence reste de mise : les contaminations de bovins constituent des « situations inattendues » qui appellent « des actions sanitaires immédiates », selon l’instance française, afin de « pouvoir maîtriser un risque émergent ».

Dans un précédent avis publié en avril, le Covars avait placé les « grippes zoonotiques » (comme celles causées par les virus influenza) au premier rang des « risques de situations sanitaires exceptionnelles majeures ». Un appel à la vigilance répété dans l’avis sorti début juin. Comme le rappellent ses experts, « l’évolution des virus H5 est imprévisible ». En particulier, « un risque majeur serait l’introduction de ce lignage viral dans un élevage porcin », car le cochon « peut servir de creuset d’adaptation ou de réassortiment ». Une passerelle vers l’homme en somme, que le virus n’a, aujourd’hui, pas encore trouvée.

Influenza : décès humain et commandes de vaccins

Emboîtant le pas aux États-Unis, l’Union européenne a annoncé le 11 juin une commande de vaccins humains contre l’influenza aviaire. Quelques jours plus tôt, le Mexique déplorait son premier décès humain lié au virus H5N2, distinct du H5N1 responsable de l’épizootie actuelle.

La Commission européenne a annoncé le 11 juin avoir signé, au nom de quinze États membres, « un contrat-cadre de passation de marchés conjoints pour la fourniture d’un maximum de 665.000 doses de vaccin pré-pandémique » humain contre l’influenza aviaire de la société britannique Seqirus. Il s’agit du seul vaccin préventif contre la grippe aviaire zoonotique (nom donné à l’influenza aviaire quand elle touche les humains) actuellement autorisé dans l’UE. Une option pour 40 millions de doses supplémentaires est prévue.

Cet achat « vise à prévenir la propagation ou les épidémies potentielles de grippe aviaire en Europe », souligne la Commission européenne. Ce vaccin est destiné « aux personnes les plus exposées à la transmission potentielle de la grippe aviaire par les oiseaux ou les animaux, tels que les travailleurs des élevages de volailles et les vétérinaires ». Bruxelles précise que « des expéditions sont actuellement en préparation vers la Finlande pour la vaccination immédiate des travailleurs à risque d’exposition, à la demande de l’État membre ».

En France, le Comité de veille et d’anticipation des risques sanitaires (Covars), préconisait depuis 2023 de constituer un stock de vaccins humains. Il suggérait aussi de vacciner les travailleurs exposés des filières avicoles et porcines contre la grippe saisonnière, pour limiter les risques de recombinaison virale. Dans un avis plus récent, cette instance placée auprès du gouvernement recommandait aussi de surveiller les élevages bovins autour des élevages de volailles touchés par la maladie, car ces ruminants sont désormais touchés par le virus aux États-Unis. Après avoir connu dix foyers en élevages à l’hiver 2023-2024, la France est actuellement indemne d’influenza aviaire.

Avec cette commande de vaccins humains, l’Europe emboîte le pas aux États-Unis, qui ont commandé fin mai 4,8 millions de doses au même fournisseur, selon le site spécialisé Watt Poultry. Outre-Atlantique, l’épizootie continue de progresser chez les bovins, avec désormais 94 foyers dans 12 États, selon l’USDA. Déjà présent chez les volailles et les oiseaux sauvages aux États-Unis, le virus H5N1 avait touché des bovins et caprins fin mars, une première mondiale.

Au Mexique, un décès humain inexpliqué

Un peu plus au sud, au Mexique, ce n’est pas le H5N1, mais un autre virus influenza, le H5N2, qui a causé pour la première fois un décès humain. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a annoncé, le 5 juin, le premier « cas fatal confirmé d’infection humaine au virus de l’influenza aviaire A (H5N2) », survenu au Mexique fin mai. Il s’agit plus largement du « premier cas d’infection humaine par un virus A (H5N2) confirmé par un laboratoire et reporté au niveau mondial ». La victime était un résident de l’État de Mexico âgé de 59 ans. Il avait été hospitalisé fin avril pour d’autres raisons et présentait de « multiples affections médicales sous-jacentes ». Testées, les personnes en contact avec lui, à l’hôpital et dans son voisinage, sont toutes négatives à l’influenza aviaire et au Covid. L’OMS indique que « la source d’exposition au virus dans ce cas est inconnue », et que le patient décédé « n’avait pas d’historique d’exposition aux volailles ou aux autres animaux ». Malgré de récents cas humains, l’OMS estime toujours que « le risque actuel pour la population générale posé par ce virus est faible ».