Nutrition animale
Un appel à relocaliser la production de protéines et d’additifs
David Salens, président de la section « nutrition animale » de La Coopération Agricole, invite professionnels et pouvoirs publics à réfléchir sur les moyens de relocaliser la production de protéines, d’additifs, de vitamines et d’acides aminés pour l’alimentation du cheptel.
« Un certain nombre de pistes ne peuvent être défrichées que de manière collaborative entre les différents métiers de nos coopératives. Je pense en particulier à la relocalisation de nos approvisionnements en protéines. Je souhaite entamer un travail de réflexion avec nos différentes filières notamment végétales à ce sujet », a déclaré David Salens clôturant la convention le 9 novembre consacrée à ce sujet. Le thème de la table ronde organisée ce jour était la décarbonation (la réduction des émissions de gaz à effet de serre, GES) de l’élevage via les matières premières. L’objectif de réduire de 20 % les émissions de GES liées à l’alimentation des animaux d’élevage d’ici 2030 incite l’élevage à innover et à réduire sa dépendance et à long terme ses coûts.
Réindustrialiser la production d’additifs et acides aminés
David Saelens a alerté les pouvoirs publics sur la nécessité de sécuriser les approvisionnements. Cette sécurisation au travers de la réduction de la dépendance française aux importations « reste la clé de notre secteur d’activité ». « C’est vrai pour les protéines, c’est vrai pour notre énergie, c’est également vrai pour nos additifs essentiels, vitamines et acides aminés pour lesquels l’Union Européenne est dépendante à plus de 80 % de la Chine », a-t-il décrit. « Nous appelons à un véritable engagement des pouvoirs publics pour soutenir les productions d’additifs existantes aujourd’hui en Europe et en France et pour inciter de nouvelles implantations industrielles dans des conditions d’exercice compétitives », a déclaré David Saelens.
Fertiliser le sol sans recourir au pétrole
Les fabricants d’aliments du bétail souhaitent s’approvisionner en matières premières moins émettrices de GES. Le soja non déforestant est un levier, mais il nécessite du transport. Les professionnels cherchent à développer la production de céréales à faibles émissions de GES. Patricia Le Cadre, directrice de recherche au Centre d’étude et de recherche sur l’économie et l’organisation des productions animales (Cereopa), a rappelé que les moyens les plus efficaces sont les engrais verts et l’implantation accrue de légumineuses comme précédents aux céréales. Les engrais azotés fabriqués à partir d’électricité renouvelable et les engrais organiques produits notamment à partir d’effluents d’élevage sont des moyens complémentaires de fertiliser à faibles émissions de GES, ajoute-t-on à la section.
Mais on reste encore loin du compte sur le plan de l’approvisionnement protéique. Antoine Hacard, président de la Coopération Agricole « métiers du grain », a appelé à un « plan protéines ambitieux ». Les rendements des protéagineux « sont désespérément bas », ce qui n’encourage pas à en emblaver. « Les pois et féveroles ont besoin de recherche génétique d’autant plus poussée que l’interdiction de nombreuses molécules conduit à des impasses techniques ». L’objectif est que la génétique améliore les rendements et la teneur en protéines des pois, féveroles et autres lupins, ce qui suppose d’obtenir des fonds conséquents.
Financer les transitions
Pour David Saelens comme pour d’autres membres de la section, il va falloir convaincre les pouvoirs publics. « Nous appelons à ce que les instruments de la Pac, et notamment le PSN et ses Eco-schemes, soient davantage mobilisés pour accompagner leur adoption, à l’instar de ce que proposent les PSN portugais ou flamand ». Son constat est que « malheureusement les dispositifs actuels d’accompagnement des transitions voulues par le gouvernement, tant au travers de France 2030 pour nos usines que de la Pac pour les éleveurs, sont inadaptés ».