À l’occasion de sa visite sur le salon Terres de Jim, le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau a soufflé le chaud et le froid lors de la fête de l’agriculture nationale. Côté pile, il a annoncé « un effort d’un milliard d’€ » dès 2024 pour la planification écologique. Côté face, le Ministre a confirmé une « première marche » signant la fin de la défiscalisation du GNR, qui représente actuellement 1,3 milliard d’€. Si la profession se félicite des moyens supplémentaires, justes nécessaires, elle ne compte pas voir la compétitivité des exploitations être dégradée.
Le 10 septembre à Cambrai, le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau a précisé les moyens dont son ministère disposera pour « assurer les transitions » dans les prochaines années. D’abord, une enveloppe « d’un milliard d’euros » supplémentaire sera proposée au budget 2024 du ministère de l’Agriculture dans le cadre du projet de loi de finances (PLF). Pas de recyclage, a assuré le ministre. Dans le détail, les alternatives aux pesticides bénéficieront notamment de 250 millions d’euros de rallonge, qui s’ajouteront à 250 millions d’euros issus du plan France 2030. La stratégie protéines sera dotée de 100 millions d’euros supplémentaires, et les diagnostics carbone et installation-transmission de 32 millions d’euros. Enfin, le Casdar bénéficiera de 15 millions d’euros de plus en 2024, et son « fonctionnement » fera l’objet d’une « évolution » pour « permettre, à terme, de mieux accompagner les prises de risques et les transitions à l’échelle de l’exploitation ». Sur les trois prochains exercices, Marc Fesneau prévoit 2,6 à 2,7 milliards d’euros d’engagements supplémentaires. Voici pour les bonnes nouvelles…
GNR : une première marche entre 60 et 70 M€
Interrogé sur la fin de la défiscalisation du gazole non routier (GNR), le ministre de l’Agriculture a annoncé une première réduction de « 60 à 70 millions d’euros » (M€) en 2024. « C’est 5 % de l’avantage fiscal [d’un total] de 1,3 milliard d'€ », précise Marc Fesneau. Le 6 septembre, le ministre de l’Économie Bruno Le Maire avait confirmé la volonté du gouvernement de supprimer totalement cette niche fiscale d’ici 2030 (avec peut-être une prolongation pour l’agriculture). « On ne peut pas continuer à financer les énergies fossiles, dire que cela ne changera pas, c’est mentir aux agriculteurs », a justifié Marc Fesneau. Le locataire de la Rue de Varenne dit avoir « obtenu que cela (les sommes économisées par la fin du tarif réduit, N.D.L.R.) revienne au monde agricole ». Dans le détail, son collègue de Bercy a évoqué un « fonds de soutien à la transition » qui pourrait être inclus dans la LOA. La FNSEA réaffirme sa volonté d’une « compensation à l’euro près, dans des modalités faisables », sans cacher son scepticisme sur la proposition de Bruno Le Maire « d’investir dans des matériels dans des matériels qui n’existent pas encore ».
Pas de taxe sur les engrais mais…
Alors que le gouvernement s’est enfermé dans sa promesse de ne pas augmenter les impôts, l’ex-Ministre de l’agriculture, actuel locataire de Bercy, joue sur les mots et explique que cette promesse ne concerne pas les taxes, différentes des impôts selon lui. Bercy est donc sur la piste d’une taxe sur les engrais azotés évoquée à la fin du printemps. Le ministre de l’Agriculture a tenu à rassurer sur le salon Terres de Jim le 10 septembre : « Vous pouvez oublier ». Pour combien de temps ? À l’occasion de l’assemblée générale de l’Unifa (fabricants d’engrais) le 1er juin, le directeur adjoint du cabinet de la ministre de la Transition énergétique, Pierre Jérémie, avait évoqué une « piste exploratoire » pour diminuer l’empreinte carbone des engrais azotés. Des travaux interministériels étaient en cours pour répliquer, dans le monde des engrais, le principe de la taxe incitative à l’incorporation de biocarburants (Tirib), avait précisé le cabinet d’Agnès Pannier-Runacher. L’idée était d’inciter à la vente d’engrais azotés fabriqués avec de l’hydrogène vert (issu des énergies renouvelables), moins émetteurs de gaz à effet de serre. En revanche, le ministre de l’Agriculture a confirmé qu’une hausse de la redevance pour pollution diffuse (RPD) était à l’étude pour le projet de loi de finances (PLF) 2024.
Dans l’attente des mesures
La FNSEA et JA ont réagi, par voie de presse, à ces annonces. « La FNSEA prend acte avec satisfaction de ces annonces. Elles répondent à une demande forte de notre syndicat sur l’accompagnement des projets agricoles pour favoriser les installations, et sur la nécessité d’appuyer les agriculteurs dans la transition écologique », indique-t-elle. De son côté, JA s’est déclaré « satisfait de voir afficher les grands axes issus des travaux de son réseau en faveur du renouvellement des générations ». Les deux organisations agricoles estiment cependant que pour atteindre l’objectif d’un nombre plus important d’installations, le gouvernement devra donner « aux porteurs des […] perspectives en termes de revenu et de conditions de vie ». « Il est maintenant urgent de les concrétiser (ces annonces) par des mesures précises », a conclu JA. La profession agricole considère qu’un tiens vaut mieux que deux tu l’auras, surtout sur la compensation au centime près de la défiscalisation du GNR qui profitait à tous les agriculteurs.