Quentin Prost à Cronat
Les contrats sécurisent la jeune exploitation de Quentin Prost
Depuis son installation en 2016, Quentin Prost développe l’engraissement des bovins nés sur son exploitation. Après les vaches, le jeune éleveur s’est mis à produire des génisses primeurs puis des jeunes bovins. Les contrats proposés par sa coopérative Sicarev l’aident à y voir clair.
Quentin Prost s’est installé en 2016 à Cronat sur une ferme reprise hors cadre familial. Aujourd’hui, il exploite 190 hectares, élève un troupeau de 115 mères charolaises et cultive un peu de céréales pour l’alimentation de ses animaux. Dès son installation, le jeune éleveur avait le projet d’engraisser sa production. Le cheptel qu’il avait repris avait le potentiel pour le faire. Et avec son groupement Sicarev (Charolais Horizon), Quentin s’est mis à « allonger progressivement ses cycles de production ». La première décision a été d’engraisser les vaches de réforme. Si cette production ne fait pas l’objet d’un contrat proprement dit, Quentin s’est tout de même engagé « dans un système de planification de l’apport avec plus-value » mis en place par son groupement. « Cela me permet de gagner 10 centimes d’euros sans rien faire, juste cliquer sur l’ordinateur ! », sourit le jeune éleveur. Quentin s’engage à produire des vaches destinées à la filière label rouge. En échange, la coopérative garantit une plus-value, y compris lorsque la bête ne trouve pas son débouché en label. L’éleveur produit une vingtaine de vaches de réformes grasses par an dont 10-12 sont valorisées en label.
Des babinettes pour Mac Do…
Il y a deux ans, Quentin s’est aussi mis à produire des génisses primeurs. Jusqu’alors, les femelles qui n’étaient pas gardées pour la reproduction étaient vendues en broutardes « un peu alourdies (400-420 kg) », confie l’éleveur qui a eu envie d’aller plus loin dans la finition. Sicarev lui a proposé de produire des femelles rajeunies dans le cadre d’un contrat pour Moy Park qui fournit McDonald’s. Il s’agit en fait de petites génisses (moins de 36 mois, 350 à 400 kg de viande) abattues à 2 ans. Leurs carcasses légères répondent bien à la demande du marché, décrit Pierre-Antoine Comte, responsable du service technique à Sicarev. Ce sont les avants qui sont contractualisés avec Moy Park pour une transformation en viande hachée. Sicarev se charge de valoriser les arrières auprès de clients distributeurs qui sont intéressés par ce type de bêtes au format modéré pour le libre-service. La contractualisation des avants permet à la coopérative de garantir un prix à l’éleveur, fait valoir Pierre-Antoine Comte. Ce prix minimum est égal au coût de production réel d’une génisse. Et lorsque le prix de marché devient supérieur, le contrat prévoit une plus-value pour atteindre ce prix de marché, détaille le technicien.
Bien entouré techniquement
Chaque fin d’hiver, Quentin trie ses femelles d’un an avec son technicien de groupement. Les futures génisses primeurs restent en bâtiment, rentabilisant la place libérée par les autres bêtes durant la saison de pâturage. Calée avec le technicien, la ration à base de maïs ensilage et d’herbe doit permettre de « mettre de la viande plus vite, et elle doit me coûter le moins cher possible », indique l’éleveur qui fait partir ses génisses primeurs en fin d’année. Si l’engraissement de ces femelles en bâtiment « ne demande pas énormément de travail », cela exige tout de même une certaine maîtrise technique, confirme Pierre-Antoine Comte. Appréciant d’être « bien entouré techniquement », Quentin effectue « un gros travail sur l’alimentation, la valorisation de l’herbe, les protocoles sanitaires, la minéralisation, la période de vêlage… ». L’engagement dans ce contrat implique quelques obligations à l’éleveur. Ainsi Quentin a-t-il dû se soumettre à un diagnostic carbone CAP2ER. Il a également participé à un programme de recherche sur le pâturage financé par McDonald’s.
Au tour des jeunes bovins
L’année dernière, Quentin a décidé d’engraisser ses dix premiers jeunes bovins (JB). Las de devoir vacciner ses broutards pour l’export et partant du principe que le plus dur est fait une fois le vêlage et l’allaitement terminés, le jeune éleveur a eu envie d’essayer un contrat de JB. Sicarev lui sécurise un prix de revient égal au prix du maigre auquel est ajouté le coût de production du JB. « La coopérative prend en charge les risques commerciaux et c’est à l’éleveur de prendre en charge les risques techniques », résume Pierre-Antoine Comte. Les mâles sont engraissés avec les génisses primeurs pour une sortie d’août à octobre à un peu plus de 450 kg de poids de carcasse. « Les babys engraissent beaucoup plus vite et mangent moins que les femelles. C’est encore plus rentable », confie Quentin qui triera vingt mâles pour l’engraissement cette année. « La production de jeunes bovins est à mettre en place progressivement pour garder de la trésorerie grâce à la vente de broutards, surtout lorsque le bilan fourrager est très dépendant des aléas climatiques », explique Pierre-Antoine Comte.
Quentin conclut que les contrats proposés par sa coopérative sont un bon moyen de sécuriser les productions de sa jeune exploitation. D’une durée de trois ans, ils permettent « de voir clair au moment d’engager ses productions, en bénéficiant de l’accompagnement précieux de son technicien ».
François Chaintron, Sicarev coop : « des contrats pour développer l’engraissement »
À Sicarev, les contrats répondent à une volonté des clients du groupe de sécuriser leur approvisionnement. Cela a notamment été le cas en 2021-2022 avec la baisse de production et la montée des cours. Pour l’aval (abattage) dont fait partie Sicarev, les contrats sont là pour sécuriser des catégories de viande. Nous sommes par exemple déficitaires en jeunes bovins alors que l’on produit énormément de broutards qui n’alimentent pas nos outils. Malgré un potentiel de naissance énorme dans la région, nos outils d’abattage sont obligés de dépendre des autres régions pour s’approvisionner. À Sicarev, avec les EGAlim, nous avons choisi de développer la contractualisation dès 2021 où nous avons fait beaucoup de contrats JB. Puis, nous avons renforcé nos contrats sur la voie femelle en 2022-2023.
Pour la plupart de ces contrats, c’est la coopérative qui prend le risque seule. Car il manque toujours l’engagement du distributeur final. Aujourd’hui, la demande de contrats de la part des clients est moins forte, car le premier souci des distributeurs est le pouvoir d’achat des consommateurs… Cela montre bien qu’il faudrait que la contractualisation aille jusqu’au bout. Malgré tout, face à la décapitalisation, le développement de l’engraissement sera un axe majeur des années à venir. Et les contrats, qui sécurisent les ateliers, sont indispensables dans cette mutation.
