Déplacements
Les géographies locales du marché du travail en BFC

D'après Jean Dupin et Florent Ovieve (Insee)
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L'Insee a réalisé une étude portant sur les trajets domicile-travail en Bourgogne-Franche-Comté. Les éléments qu'elle présente sont riches d'enseignements sur les dynamiques économiques à l'oeuvre sur les territoires.

Les géographies locales du marché du travail en BFC
L'étude des déplacements liés au travail est un bon baromètre des dynamiques économiques à l'oeuvre sur les territoires.

Observer les comportements et les habitudes des habitants de la Bourgogne-Franche-Comté (BFC), en matière de déplacement domicile-travail, c’est l’exercice auquel s’est livré l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). Il en résulte une étude, intitulée « Domicile-travail : le choix de la proximité », qui a été présentée en juillet. Notre Région compte un peu plus de 1,1 million d’actifs. Près de 700.000 résidents et travaillent dans la même intercommunalité (Établissement public de coopération intercommunal – EPCI). Mais ils sont 431.000 à changer d’EPCI pour aller travailler, soit près de 40 %. Ce nombre de navetteurs a augmenté de 8 % entre 2009 et 2019 et les distances de déplacements nécessaires ont suivi la même courbe ascendante. Les territoires de travail observés sont donc très évolutifs et de tailles variables (voir encadré).

Peu d’échanges entre les pôles d’emploi principaux

Pour 54 intercommunalités sur 113 en BFC, le territoire de travail se limite, au plus, à deux autres EPCI. Dans celles-ci, les trois quarts des actifs occupent un emploi au sein de ce territoire de travail. Dans le contexte d’une population active en recul, identifier cette géographie locale du marché du travail d’un EPCI est important pour appréhender sa dynamique économique. Assez logiquement, les plus grands EPCI, qui concentrent le plus d’emplois et sont plus attractifs, sont aussi ceux dont on sort le moins pour aller travailler : on constate que seuls 0,3 % des actifs de Dijon Métropole effectuent la navette quotidiennement vers Grand Besançon Métropole, et seulement 0,6 % qui font le trajet inverse. Exception relative à cette règle : les intercommunalités de Belfort et de Montbéliard se distinguent par d’intenses échanges quotidiens. Respectivement 15,5 % et 9,3 % de leurs actifs font la navette de l’une à l’autre du fait de leur proximité géographique. Les intercommunalités dont le territoire de travail se restreint à un ou deux autres EPCI sont faiblement peuplées. Elles se situent principalement sur une diagonale qui s’étend de l’est de la Saône-et-Loire à l’ouest de l’Yonne, dans l’ouest du Jura et dans le nord de la Haute-Saône.

Populations rurales et âgées

Généralement éloignés des villes moyennes, ces territoires de travail sont constitués d’intercommunalités rurales non périurbaines, avec un nombre d’emplois plus réduit. Ainsi, le territoire de travail de la Communauté de communes Morvan Sommets et Grands Lacs (Château-Chinon, dans la Nièvre) se limite à lui-même et à la Communauté de communes d’Avallon-Vézelay-Morvan, dans l’Yonne. En effet, les intercommunalités de Nevers et du Creusot-Montceau sont trop éloignées pour qu’une part significative d’actifs s’y rendent. L’emploi régresse dans l’ensemble des territoires de travail de ces EPCI. Ils comptent une part plus importante d’emplois dans les secteurs industriels et de la construction, en déclin. Ces EPCI se caractérisent par une population de plus en plus âgée. Les EPCI aux franges de la Région peuvent compter dans leur territoire de travail des intercommunalités éloignées. De nombreux actifs les quittent pour se rendre dans des territoires dont le dynamisme offre des opportunités d’emploi aux actifs. Ainsi, les EPCI localisés au nord de l’Yonne à proximité de la Communauté d’agglomération du Grand Sénonais intègrent la métropole du Grand Paris, et son poids économique majeur, à leurs territoires de travail. Ces intercommunalités bénéficient d’infrastructures routières et ferroviaires permettant de favoriser ces déplacements. Un actif sur 15 de l’EPCI de Sens et plus d’un actif sur 10 de celui de l’Yonne Nord travaillent à Paris. Parmi les navetteurs, les cadres et professions intellectuelles supérieures sont surreprésentés par rapport aux actifs stables. Il en va de même entre Mâconnais et métropole de Lyon. Mais l’accès à ces emplois a un coût important, en temps de transport ou financièrement. Les navetteurs de ces EPCI sont ceux dont les temps de trajet sont les plus importants de BFC, atteignant même plus d’une heure en moyenne pour les actifs sortants du Grand Sénonais. On retrouve un schéma assez voisin à l’est de la Région, sur la frontière franco-suisse.

Territoires de travail

Pour comprendre les logiques qui se rattachent à nos déplacements entre notre domicile et notre lieu de travail, il importe d’avoir en tête la notion de « territoire de travail » telle que l’Insee l’entend : le territoire de travail des actifs en emploi d’un Établissement public de coopération intercommunal (EPCI) se compose de ce territoire et des intercommunalités dans lesquelles ils sont au moins 4 % à se rendre pour travailler. En Bourgogne-Franche-Comté (BFC), plus d’un EPCI sur deux a un territoire de travail non continu. Cela s’explique principalement par la présence d’un ou plusieurs pôles d’emploi attractifs à des distances de trajets raisonnables. Les actifs, lorsqu’ils ont accès à une offre ferroviaire suffisante, peuvent parcourir des distances plus grandes afin d’occuper un emploi et obtenir un revenu conforme à leurs attentes. Par exemple, ceux de Dole, dans le Jura, et Gray, en Haute-Saône, intègrent aussi bien Dijon Métropole que Grand Besançon Métropole dans leurs territoires de travail, sans que les EPCI situés entre eux n’en fassent partie. Cette discontinuité des territoires de travail est particulièrement marquée aux franges régionales et le long de l’arc urbain Mâcon – Dijon – Besançon – Belfort. Un EPCI peut appartenir à plusieurs territoires de travail.