Delphine et Olivier Marconnot à Saint-Prix
Delphine et Olivier Marconnot se demandent comment vont-ils faire sans le statut de conjoint collaborateur

Marc Labille
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Depuis une trentaine d’années, Olivier Marconnot est horticulteur spécialisé dans les plantes de toitures végétales. Il travaille aujourd’hui avec son épouse Delphine sur une microstructure dans le Morvan. En 2026, Delphine ne pourra plus bénéficier du statut de conjoint collaborateur. Une perspective précaire pour laquelle le couple ne voit pas de solution.

Delphine et Olivier Marconnot se demandent comment vont-ils faire sans le statut de conjoint collaborateur
Au terme d’une trentaine d’années d’activité d’horticulteur, Olivier ne se voit pas créer un poste de salarié pour son épouse Delphine ni créer une société.

Olivier Marconnot est horticulteur depuis 1989 et son exploitation a pour nom « La Pépinière du Chardon Bleu ». Il a débuté son activité dans l’Isère avant de rejoindre le Morvan en 2011 poussé par la flambée du prix du foncier dans la région grenobloise. Aux pieds du Mont-Beuvray et du Haut-Folin, la structure compte environ 2.500 mètres carrés de terres en location sur lesquels trois tunnels d’une surface totale de 500 mètres carrés servent à l’activité de pépiniériste. Olivier travaille avec son épouse Delphine et leur spécialité est la production de plantes de toiture végétale. Ils se sont aussi diversifiés dans les plants d’arbustes à petits fruits (myrtilles, camérisiers). Delphine et Olivier commercialisent leur production dans toute la France grâce à Internet et la vente par correspondance.

Baisse de chiffre d’affaires…

Jusqu’en 2010, Olivier a profité d’une bonne croissance de la demande, mais depuis, le marché est devenu plus difficile et l’exploitation fait face à une chute de son chiffre d’affaires. À l’heure du réchauffement climatique, les toitures végétales devraient pourtant avoir le vent en poupe, mais la concurrence a pris le dessus dans des marchés très en dents de scie, confie Olivier Marconnot. Et comme dans beaucoup de domaines, il y a les paroles et les actes… La communication généreuse sur l’écologie n’est pas vraiment suivie d’effet. « Tout le monde est partant, mais personne n’achète ! », se désole Olivier qui pointe aussi les collectivités empêchées par le code des marchés publics.

Hausse des charges

Depuis janvier, Olivier constate une baisse du chiffre d’affaires sur ses ventes par Internet de 54 %. Un chiffre d’affaires divisé par trois par rapport aux années fastes. Les problèmes de pouvoir d’achat des ménages sont une des explications. « Le bâtiment va mal ; on parle de licenciement », rapporte l’horticulteur. Pendant ce temps, les charges ne font qu’augmenter. L’exploitation va devoir payer 600 € de plus de cotisations MSA cette année… « On paye 7.000 € de cotisations par an alors que nous n’avons que 12.000 € de revenu à deux ! », déplore Olivier qui parle de « galère économique ».

Statut conjoint collaborateur

C’est dans ce contexte difficile que le couple appréhende la fin du statut de conjoint collaborateur pour Delphine à compter de janvier 2026. Ce statut lui donnait droit à « une couverture sociale et à quelques points de retraite », explique Olivier. Un statut qui arrangeait bien Delphine qui souffre d’une maladie auto immune handicapante mais non reconnue. L’exploitation lui permettait d’avoir une activité professionnelle adaptée à sa pathologie.

Salariée ou associée ?

En janvier 2026, le couple aura deux options : soit Delphine devient salariée de la structure soit elle s’associe avec Olivier dans le cadre de la création d’une société (Gaec, EARL…). Aucune de ces deux alternatives n’est envisageable pour la petite exploitation. Pour embaucher son épouse, Olivier aurait besoin de « sortir 1.700 € par mois… On ne gagne que 1.000 € mensuels aujourd’hui ! ». Et pour créer un Gaec, « cela nécessite des moyens comptables qui ne sont pas envisageables dans notre situation », explique Olivier.

Le couple ne voit vraiment pas comment il va faire face à cette échéance. Si son épouse continue de l’aider, Olivier risque de se retrouver dans l’illégalité. Face à cette impasse, l’horticulteur envisage même d’arrêter son activité. Mais sans certitude de retrouver du travail la soixantaine passée…

Pour Delphine et Olivier, il faudrait leur maintenir ce statut de conjoint collaborateur car, malgré ses imperfections, il demeure la seule solution, pour ne pas dire un moindre mal, pour des situations particulières comme la leur. Et le couple ne serait pas le seul à connaître ce dilemme. En dépit de l’incitation à quitter ce statut réputé précaire, beaucoup d’exploitants continueraient à n’avoir que cette option, estime Olivier.

Cotisant solidaire pendant neuf ans et perdant

Âgé de 60 ans, l’horticulteur vit aussi une autre grande désillusion quant à sa future retraite. En effet, lorsqu’il a débuté son activité agricole, comme la modestie de son activité agricole ne lui permettait pas d’être affilié à la MSA, il a bénéficié du statut de « cotisant solidaire ». Cela lui permettait de ne payer que 25 % du montant de cotisations sociales, mais « à fonds perdu », se désole aujourd’hui Olivier qui bénéficiait à l’époque de la couverture sociale de son épouse. Résultat, il lui manque aujourd’hui 9 années de cotisations pour sa retraite. Ce qui ne lui permet pas d’envisager un départ avant 73 ans ! Olivier estime que ce statut de cotisant solidaire est le lot de nombreux jeunes se lançant dans des productions à petites surfaces telles maraîchage, horticulture, etc. Un autre motif de précarité qui mériterait une évolution.

Conjoint-collaborateur : un statut limité à cinq ans

Depuis le 1er janvier 2022, le statut de conjoint collaborateur est limité à cinq ans. « Si vous bénéficiez déjà du statut de collaborateur d’exploitation ou d’entreprise agricole à la date du 1er janvier 2022, vous ne pourrez conserver ce statut au-delà du 31 décembre 2026 », indique la MSA sur son site web.

Des sedums pour les toitures végétalisées

Des sedums pour les toitures végétalisées

Olivier Marconnot produit des plantes pour toitures végétales depuis une trentaine d’années. Avec son épouse Delphine, il cultive une centaine de variétés de sédums vivaces, une plante succulente ou charnue capable de résister aux températures extrêmes. Les sedums sont commercialisés en micro-mottes conditionnées en caissettes contenant de quoi implanter dix mètres carrés de toiture végétalisée. Les plants de sédums sont cultivés hors-sol sur un substrat spécifique en agriculture biologique. Pour en savoir plus, www.toiture-bio.com