Accès au contenu
Grumes de chêne

La hausse des cours du chêne et la concurrence des acheteurs de grumes pour la Chine inquiètent les scieurs

La hausse des cours du chêne et la concurrence des acheteurs de grumes pour la Chine inquiètent les scieurs, même en Saône-et-Loire où la ressource est pourtant abondante. Quand le chêne s’en va sans passer par la case sciage…

La hausse des cours du chêne et la concurrence des acheteurs de grumes pour la Chine inquiètent les scieurs

Avec le douglas, le chêne constitue le capital bois du département. Les deux essences cultivent leurs différences. Quand un douglas peut se récolter à partir de 40 ans, il faut attendre plus d’un siècle pour obtenir un chêne de qualité. La Saône-et-Loire en récolte annuellement plus de 100.000 m3 qui sont, pour l’essentiel, transformés sur place par trois acteurs majeurs : Les scieries réunies du Chalonnais, Margaritelli et le Groupe Ducerf, un des leaders du chêne en France.

Après la crise qui a fortement impacté la vente de sciages, les transformateurs retrouvent des marchés dynamiques, mais ils doivent désormais composer avec une hausse régulière du coût de la matière première : +15 % en moyenne par an depuis quatre ans. Le dernier baromètre des experts forestiers donne une valeur moyenne de 168 € le mètre cube. Il était de 100 € en 2013. Difficile dès lors de répercuter de telles hausses sur les produits !

« Nous l’avons fait jusqu’à présent mais nous allons arriver à une limite », prévient Jacques Ducerf, le PDG du groupe éponyme, pour qui « l’impact de la matière sur les prix de revient va commencer à poser un problème chez certains clients. Au prix où est le chêne, il leur sera difficile de suivre… ».

Contraint d’acheter à 200 km

Alors que les marchés sont porteurs, les trois principaux scieurs sont obligés d’appuyer sur le frein, faute de carburant. Non seulement le chêne est cher, mais il faut aller le chercher de plus en plus loin.

À la fin du XIXe siècle, l’arrière-grand-père de Jacques Ducerf approvisionnait le ban de scie de Vendenesse-lès-Charolles dans un rayon de 10 à 20 km. Désormais, pour remplir son parc de 30.000 m3, le scieur pousse dans l’Allier, l’Indre, l’Yonne… car la compétition est de plus en plus rude avec les traders qui achètent des grumes pour le marché chinois.

« En 2017, la France a exporté 500.000 m3 de grumes, c’est-à-dire un quart de la récolte totale de chêne », déplore l’industriel charollais. « Si nous continuons à ce rythme, ce sera 1 m3 sur 3 en 2018 et des scieries vont fermer ».

Cette concurrence dans leur jardin est un phénomène nouveau. En avril, un trader a acheté un lot de chêne à 3 km de la scierie Ducerf, du jamais vu ! Ces acheteurs sont imbattables en terme de prix, grâce à des coûts de transport ridiculement bas : « affréter un camion de Charolles à Brest nous coûte 1.300 €, autant qu’un container pour Shangaï »…

Le comble est que les carnets de commande sont pleins ! Au niveau national, les scieurs estiment qu’il leur manque 400.000 m3 de matière première pour satisfaire la demande. En Saône-et-Loire, les trois leaders auraient les capacités de transformer 30.000 m3 supplémentaires.

Alors que faire ? Depuis un an, la Fédération nationale du bois réclame au Gouvernement des mesures de protection, comme l’ont fait les principaux pays producteurs de bois dans le monde. Pour la richesse nationale, il serait plus rentable d’exporter des sciages. Margaritelli l’a bien compris en développant un commerce de lamelles de chêne avec la Chine pour la fabrication de parquet, ou Ducerf qui distribue en Asie des carrelets de chêne pour fabriquer des fenêtres. En attendant le plan d’urgence pour le chêne promis par le Gouvernement, les scieurs demandent aux propriétaires privés de préférer les scieurs locaux aux exportateurs. La forêt publique a été contrainte à cet effort en excluant les négociants de ses ventes de chêne.

Ducerf parviendra-t-il à tenir son plan de développement qui porterait ses capacités à 50.000 m3 en 2020 ? Rien n’est moins sûr aujourd’hui. « Nous devrons trouver des solutions pour garantir nos approvisionnements. C’est vraiment dommage car les marchés sont là ».

Images