La Région Bourgogne Franche-Comté doit faire face à un manque de crédit de 65 millions d'€ au sujet du Feader...
« C’est au pied du mur qu’on voit le maçon ! ». Par le titre de son interpellation, la FRSEA Bourgogne Franche-Comté place devant leurs responsabilité l’Etat et la Région alors que les besoins du Feader BFC font apparaître un manque de crédit de plus de 65 millions d’€…

Avec la nouvelle programmation européenne, les régions sont devenues organismes de gestion des fonds européen. Concrètement, elles gèrent depuis 2014 une partie du deuxième pilier de la Pac avec le Feader.
Après un démarrage difficile, la réalisation des programmes informatiques de l’Agence de services et de paiement (ASP) a retardé de nombreux règlements : le programme Osiris* n’avait sans pas reçu la bénédiction des dieux… Les choses rentrent petit à petit dans l’ordre, enfin presque, les aides 2015 pour l’agriculture biologique ne sont toujours pas versées et l’instruction de mesures rurales n’a pas encore démarré. Autre particularité incongrue qui ne facilite pas les choses, les programmes de développement ruraux régionaux (PDRR) qui définissent les actions du Feader ont été établis à partir des anciennes régions. Ainsi, la nouvelle région Bourgogne Franche-Comté doit-elle en fin de compte gérer deux programmes : un pour la Bourgogne, un pour la Franche-Comté et bien entendu avec des mesures différentes…
Racler les fonds de tiroir
À mi-parcours, les principaux dispositifs pour le secteur agricole manquent déjà de crédits : le Plan pour la compétitivité et l'adaptation des exploitations agricoles (PCAE) -22 millions d’€ concernant essentiellement les bâtiments d’élevage, les aides à la conversion en agriculture biologique (-34 millions d’€) et -9 millions d’€ pour les aides aux industries agroalimentaires et autres.
Fort heureusement, des reliquats pourront être récupérés notamment sur l’installation (19 millions d’€) et il y a encore une enveloppe pour la région de 8,8 millions d’€ liés au transfert du premier pilier vers le deuxième. Mais cela ne fait pas encore le compte et il manquera toujours quelque millions d’€ au final…
Alors, c’est maintenant que l’organisme de gestion va devoir déployer son savoir-faire. Les soixante mesures doivent être passées au peigne fin, pour regarder les reliquats possibles.
L’absence de cohérence
Il faut prévoir la traditionnelle tournée des financeurs pour solliciter les partenaires comme le faisait auparavant chaque année la direction régionale de l’agriculture. Il est surprenant que les Agences de l’eau qui voulaient "Sauver l’eau" se défilent en fin de compte pour mettre fin à leurs financements de la conversion à l’agriculture biologique ! Les Conseils départementaux doivent aussi optimiser leurs moyens pour ne pas se décharger de toutes leurs compétences, et cela tout en recherchant les outils les plus efficaces nécessaires au développement de notre région.
Cette nouvelle répartition des compétences nécessite de trouver de nouveaux équilibres entre investissements et fonctionnement…
Quant à l’État - qui organise ses États généraux de l’alimentation -, il a bien des difficultés à expliquer concrètement ce qu’il envisage de faire avec son plan d’investissements annoncé à 5 milliards d’€... Pour l’instant, un ministre souhaite « sortir des produits phytos » quand, dans le même temps, son collègue annonce la fin des aides de l’État à l’agriculture biologique…
Trouver des solutions acceptées et acceptables
Pour cela, loin de ses certitudes, l’organisme de gestion - on parle du Conseil régional - devra faire preuve d’écoute et d’ingénierie pour prendre en compte tous les paramètres de cette difficile équation et devra trouver des solutions équilibrées pour qu’elles soient acceptées et acceptables, et cela tout en assumant ses responsabilités.
Certaines régions ont déjà rapproché leurs PDRR, pour faire plus simple, plus juste et limiter les dépenses d’assistances techniques.
Les besoins ne doivent pas être surestimés et les reliquats - sous-estimés avec des approches à la louche - ont fini par le grand écart en créant des inégalités. En effet, comment expliquer que pour un même investissement, le montant de la subvention puisse varier de 0 à 10 en fonction de sa région ou en fonction de la date où l’agriculteur réalise son investissement ?
La régionalisation a, par exemple, mis fin à la mutualisation nationale des anciennes programmations laquelle permettait de pouvoir réaliser des ajustements en fin d’année en fonction des besoins de chaque région.
Dans ce contexte, pour la profession, la première priorité est de préserver les aides aux Zones défavorisées. Et à ce sujet il faut préciser que nous n’avons pas encore abordé ce sujet, alors même que l’ICHN représente plus 45 % du Feader…
Devant la difficulté de trouver des équilibres financiers, la réforme des Zones défavorisées simples devrait être reportée à 2019 par la Commission européenne. Mais il sera difficile de cautionner des numéros de prestidigitation qui consisteront à prélever davantage aux agriculteurs sur le premier pilier, pour leur en redonner un peu moins sur le deuxième pilier !
La profession a toujours recherché des solutions réalistes. Il faudra faire des économies sur les sur-plafonds du PCAE comme sur l’aide au maintien en agriculture biologique. Car c’est au marché de prendre en charge les coûts de production liés à un signe officiel de qualité. Mais ces derniers points ne pourront être qu’une partie de la réponse à la question posée. Il est difficile de boucler tout cela en dix jours pour les prochains comités de suivi de Bourgogne et Franche-Comté des 21 et 22 novembre…
Alex Sontag
* Osiris est le dieu égyptien inventeur de l’Agriculture…