Bourgogne du Sud se donne les moyens de franchir le MUR
Lors de son assemblée générale à Beaune le 7 décembre dernier, la coopérative Bourgogne du Sud a dévoilé les grandes lignes de son plan pour faire face au MUR qui se dresse devant l'agriculture. M.U.R. pour mondialisation, ubérisation et réglementation. Un triptyque qui bouleverse les marchés mais qui peut également être source d’opportunités. Sous certaines conditions...

Pour décrire l’exercice 2017, le directeur, Michel Duvernois parlait d’un « retour à la normale après la catastrophe » que fut la campagne 2016, qui avait touché toutes les productions de la coopérative : grandes cultures, viticultures, élevage… Une normalité toute relative néanmoins puisque si la récolte a été « sympathique », sa valorisation sur des marchés mondiaux abondants le fût beaucoup moins.
Avec 566.884 tonnes collectées au total pour une capacité de stockage de 420.000 t, le record de collecte a failli être battu par les 1.300 cultivateurs adhérents et leurs 95.000 ha de surfaces. Les rendements furent « élevés » en blé (245.328 t), en orge (67.968 t) et en colza (62.849 t). A noter également le « très fort développement » de la sole en soja (26.134 t). Avec 154.151 t, le maïs reste la deuxième culture produite sur le secteur.
La collecte a été valorisée 114 millions d’€. « Bien répartis par secteurs et par production », les 30 magasins distribuant les approvisionnements comptent pour 46 millions d’€ dans le chiffre d’affaire. La viticulture a généré 23 M€ de chiffre d’affaires de Dijon à Mâcon, tandis que l’élevage 16 M€ pour notamment 42.500 tonnes d’aliments du bétails consommés. En rajoutant la production de semences (7 M€), les filiales (30 M€) et la distribution vers le grand public (Gamm vert ; Frais d’ici ; Horma’Nat) pour 17 M€, le chiffre d’affaires consolidé pour le groupe en 2017/2018 s’est élevé à 268 millions d’€.
Du côté des charges d’exploitations, en raison d’une hausse de l’activité et des stocks, elles ont augmenté. Le directeur revenait sur l’impact des grèves SNCF qui ont gonflé la facture transports. Il craignait surtout « de voir nos clients changer de producteurs, notamment en maïs pour nos amis amidonniers ». Au final néanmoins, le résultat sur l’exercice fut de 3.917.362 €. La coopérative a décidé de reverser 1,33 millions d’€ en ristournes pour les céréales et 746.930 € pour les approvisionnements, soit 1,83 M€ au total.
Partie pour durer jusqu’en 2118 !
Le vice-président, Lionel Borey enchainait sur la partie extraordinaire de cette AG pour modifier les statuts à la coopérative. Parmi les résolutions présentées et adoptées, on notera la possibilité pour la coopérative de collecter des raisins. Pour cela, un dossier de demande d’extension d’objet sera déposé auprès du Haut conseil de la coopération agricole (HCCA). A noter également, la suppression de l’obligation d’apport total. Le président de Bourgogne du Sud, Didier Laurency donnait - en quelque sorte - son point de vue sur cette volonté « de nos bien pensants » politiques. Le conseil d’administration doit maintenant décider du pourcentage. En parallèle, il sera possible pour un agriculteur ou viticulteur de « tester le système coopératif avant de faire un choix » avec la levée de la période probatoire. Enfin, les coopératives devant se fixer une durée de vie, qui prenait fin le 21 mars prochain, Bourgogne du Sud a repoussé cette échéance au 7 décembre 2118. Ce qui faisait réagir les 200 adhérents présents.
Mais quelle forme aura la coopérative à cette date ? Nul ne le sait, tant Bourgogne du Sud a déjà évolué ces dernières années, notamment avec ses Unions de coopératives (Area, Cerevia, Logivia, PIAE/Artemis, Alliance BFC…) ou acquisitions (Fichet SAS, Viti-vini Services…) comme le montrait deux infographies entre 2008 et 2018.
Droit dans le MUR ?
Il n'y a pas que des changements voulus, il y a ceux également subis. Le président, Didier Laurency revenait sur le récent article de loi sur la séparation du conseil et de la vente de produits phytosanitaires. Même s’il faut encore attendre les décrets d’application, les EGAlim semblent - comme le Grenelle de l’environnement en son temps – aboutir, par « dogmatisme » des pouvoirs publics, à « augmenter le coût pour nous paysans », notamment là, sur l’aspect conseil stratégique annuel. La coopérative ne compte pas se laisser faire et « saura s’adapter tant pour le service rendu aux adhérents que pour nos techniciens ». Idem pour la disparition actée des 3R - remises, rabais, ristournes – qui va « renchérir le coût final » des phytos en bio comme en conventionnel.
« Cet aspect réglementaire vient pénaliser notre compétitivité et nous emmène droit dans le MUR de la Mondialisation, de l’Ubérisation et de la Réglementation » à outrance, craignait-il dans son rapport moral.
Prêts pour l’avenir ?
Alors comment franchir ce MUR ? et se préparer pour l’avenir, questionnaient et apportaient des pistes de réponses, Didier Laurency, Lionel Borey et Michel Duvernois. Ce dernier reconnaissait que la France « n’a pas vu venir nos amis de la mer noire » sur les marchés exports du pourtour méditerranéen. Un recentrage sur le marché national s'est opéré donc. Autre changement, « avec Cerevia, tous les matins, j’espère que le climat va mal ailleurs. Un drôle de métier surtout quand c’est chez nous », témoignait-il. A cette volatilité des cours sur les marchés, les coûts de production sont eux en hausse constante.
Sur ces sujets anciens, la coopérative a déjà « enclenché de nombreuses actions » : comprimer les charges, optimiser, aller chercher plus de valorisation… pour au final « améliorer la compétitivité à la coopérative et aux niveaux des adhérents ». Au niveau de la coopérative, c’est notamment le cas avec les filiales et unions de coopératives.
« Grande dernière » puisque née le 1er janvier 2018, Alliance BFC – avec Dijon Céréales et Terre Comtoise - était citée pour la mise en commun des fonctions supports (informatique, qualité, sécurité, environnement, communication…). Des dossiers qui doivent permettre de faire face à l’ubérisation (plateformes ou places de marché web) des services notamment. L’arrivé du numérique (informatique) s’applique de plus en plus « à l’agronomie jusqu’aux achats avec de nouveaux acteurs, GAFA (Google, Amazon, Facebook, Apple…) ou start-ups ». Positif ou négatif, difficile à dire. Mais ces chantiers informatiques sont lancés.
« Vous avez tous déjà dans vos tracteurs un tas de services informatiques », glissait Lionel Borey. Ce qui peut lui permettait de faire le lien avec la réglementation. Le législateur voit la société réclamer « moins de phyto ». Associer agronomie, matériel végétal, formations… et nouvelles technologies peuvent être complémentaires. « L’agriculture de demain se passera dans les champs et dans les étoiles », avec les données satellites et autres (drones, capteurs…).
La réglementation Française ou Européenne peut aussi être une « chance d’afficher notre différence, notre savoir-faire et profiter de la notoriété de nos terroirs », positivait Didier Laurency. Il prenait l’exemple de l’enjeu protéines avec Extrusel qui fournit une alimentation animale non OGM pour les élevages de Bourgogne Franche-Comté. Une version alimentation humaine verra bientôt le jour.
Alors que les Etats-Unis et d’autres se lancent dans les viandes « artificielles », la Bourgogne Franche-Comté pourra mettre en face et en avant son élevage « haut de gamme », comme a su le faire notre viticulture qui est la référence mondiale.
Bourgogne du Sud se donne les moyens de franchir le MUR

Pour décrire l’exercice 2017, le directeur, Michel Duvernois parlait d’un « retour à la normale après la catastrophe » que fut la campagne 2016, qui avait touché toutes les productions de la coopérative : grandes cultures, viticultures, élevage… Une normalité toute relative néanmoins puisque si la récolte a été « sympathique », sa valorisation sur des marchés mondiaux abondants le fût beaucoup moins.
Avec 566.884 tonnes collectées au total pour une capacité de stockage de 420.000 t, le record de collecte a failli être battu par les 1.300 cultivateurs adhérents et leurs 95.000 ha de surfaces. Les rendements furent « élevés » en blé (245.328 t), en orge (67.968 t) et en colza (62.849 t). A noter également le « très fort développement » de la sole en soja (26.134 t). Avec 154.151 t, le maïs reste la deuxième culture produite sur le secteur.
La collecte a été valorisée 114 millions d’€. « Bien répartis par secteurs et par production », les 30 magasins distribuant les approvisionnements comptent pour 46 millions d’€ dans le chiffre d’affaire. La viticulture a généré 23 M€ de chiffre d’affaires de Dijon à Mâcon, tandis que l’élevage 16 M€ pour notamment 42.500 tonnes d’aliments du bétails consommés. En rajoutant la production de semences (7 M€), les filiales (30 M€) et la distribution vers le grand public (Gamm vert ; Frais d’ici ; Horma’Nat) pour 17 M€, le chiffre d’affaires consolidé pour le groupe en 2017/2018 s’est élevé à 268 millions d’€.
Du côté des charges d’exploitations, en raison d’une hausse de l’activité et des stocks, elles ont augmenté. Le directeur revenait sur l’impact des grèves SNCF qui ont gonflé la facture transports. Il craignait surtout « de voir nos clients changer de producteurs, notamment en maïs pour nos amis amidonniers ». Au final néanmoins, le résultat sur l’exercice fut de 3.917.362 €. La coopérative a décidé de reverser 1,33 millions d’€ en ristournes pour les céréales et 746.930 € pour les approvisionnements, soit 1,83 M€ au total.
Partie pour durer jusqu’en 2118 !
Le vice-président, Lionel Borey enchainait sur la partie extraordinaire de cette AG pour modifier les statuts à la coopérative. Parmi les résolutions présentées et adoptées, on notera la possibilité pour la coopérative de collecter des raisins. Pour cela, un dossier de demande d’extension d’objet sera déposé auprès du Haut conseil de la coopération agricole (HCCA). A noter également, la suppression de l’obligation d’apport total. Le président de Bourgogne du Sud, Didier Laurency donnait - en quelque sorte - son point de vue sur cette volonté « de nos bien pensants » politiques. Le conseil d’administration doit maintenant décider du pourcentage. En parallèle, il sera possible pour un agriculteur ou viticulteur de « tester le système coopératif avant de faire un choix » avec la levée de la période probatoire. Enfin, les coopératives devant se fixer une durée de vie, qui prenait fin le 21 mars prochain, Bourgogne du Sud a repoussé cette échéance au 7 décembre 2118. Ce qui faisait réagir les 200 adhérents présents.
Mais quelle forme aura la coopérative à cette date ? Nul ne le sait, tant Bourgogne du Sud a déjà évolué ces dernières années, notamment avec ses Unions de coopératives (Area, Cerevia, Logivia, PIAE/Artemis, Alliance BFC…) ou acquisitions (Fichet SAS, Viti-vini Services…) comme le montrait deux infographies entre 2008 et 2018.
Droit dans le MUR ?
Il n'y a pas que des changements voulus, il y a ceux également subis. Le président, Didier Laurency revenait sur le récent article de loi sur la séparation du conseil et de la vente de produits phytosanitaires. Même s’il faut encore attendre les décrets d’application, les EGAlim semblent - comme le Grenelle de l’environnement en son temps – aboutir, par « dogmatisme » des pouvoirs publics, à « augmenter le coût pour nous paysans », notamment là, sur l’aspect conseil stratégique annuel. La coopérative ne compte pas se laisser faire et « saura s’adapter tant pour le service rendu aux adhérents que pour nos techniciens ». Idem pour la disparition actée des 3R - remises, rabais, ristournes – qui va « renchérir le coût final » des phytos en bio comme en conventionnel.
« Cet aspect réglementaire vient pénaliser notre compétitivité et nous emmène droit dans le MUR de la Mondialisation, de l’Ubérisation et de la Réglementation » à outrance, craignait-il dans son rapport moral.
Prêts pour l’avenir ?
Alors comment franchir ce MUR ? et se préparer pour l’avenir, questionnaient et apportaient des pistes de réponses, Didier Laurency, Lionel Borey et Michel Duvernois. Ce dernier reconnaissait que la France « n’a pas vu venir nos amis de la mer noire » sur les marchés exports du pourtour méditerranéen. Un recentrage sur le marché national s'est opéré donc. Autre changement, « avec Cerevia, tous les matins, j’espère que le climat va mal ailleurs. Un drôle de métier surtout quand c’est chez nous », témoignait-il. A cette volatilité des cours sur les marchés, les coûts de production sont eux en hausse constante.
Sur ces sujets anciens, la coopérative a déjà « enclenché de nombreuses actions » : comprimer les charges, optimiser, aller chercher plus de valorisation… pour au final « améliorer la compétitivité à la coopérative et aux niveaux des adhérents ». Au niveau de la coopérative, c’est notamment le cas avec les filiales et unions de coopératives.
« Grande dernière » puisque née le 1er janvier 2018, Alliance BFC – avec Dijon Céréales et Terre Comtoise - était citée pour la mise en commun des fonctions supports (informatique, qualité, sécurité, environnement, communication…). Des dossiers qui doivent permettre de faire face à l’ubérisation (plateformes ou places de marché web) des services notamment. L’arrivé du numérique (informatique) s’applique de plus en plus « à l’agronomie jusqu’aux achats avec de nouveaux acteurs, GAFA (Google, Amazon, Facebook, Apple…) ou start-ups ». Positif ou négatif, difficile à dire. Mais ces chantiers informatiques sont lancés.
« Vous avez tous déjà dans vos tracteurs un tas de services informatiques », glissait Lionel Borey. Ce qui peut lui permettait de faire le lien avec la réglementation. Le législateur voit la société réclamer « moins de phyto ». Associer agronomie, matériel végétal, formations… et nouvelles technologies peuvent être complémentaires. « L’agriculture de demain se passera dans les champs et dans les étoiles », avec les données satellites et autres (drones, capteurs…).
La réglementation Française ou Européenne peut aussi être une « chance d’afficher notre différence, notre savoir-faire et profiter de la notoriété de nos terroirs », positivait Didier Laurency. Il prenait l’exemple de l’enjeu protéines avec Extrusel qui fournit une alimentation animale non OGM pour les élevages de Bourgogne Franche-Comté. Une version alimentation humaine verra bientôt le jour.
Alors que les Etats-Unis et d’autres se lancent dans les viandes « artificielles », la Bourgogne Franche-Comté pourra mettre en face et en avant son élevage « haut de gamme », comme a su le faire notre viticulture qui est la référence mondiale.